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Bruno Amouroux,                                      dans son roman « Ô N’Djamena », avoue ses regrets :

 

« Je n’ai pas, le premier, volé sur un plus lourd que l’air (Clément Ader, 1890), je n’ai pas, le premier, traversé la Manche (Louis Blériot, 1909), je n’ai pas, le premier, traversé la Méditerranée (Roland Garros, 1913), je n’ai pas, le premier, traversé l’Atlantique (Charles Lindbergh, 1927), je n’ai pas, le premier, vaincu la Cordillère des Andes (Adrienne Bolland, 1921), je n’ai pas, le premier, marché sur la lune (Tintin, 1954)… »

Il a juste oublié un évènement qui eut lieu en 1947 et changea l’histoire de l’aviation…

 

Mais commençons par le commencement : qui connait ce nom : Charles Elwood "Chuck" Yeager ?

Bien peu de gens en vérité…

Pourtant, il a sa place dans cette rubrique d’hommes et de femmes hors du commun. Une place …exceptionnelle !

Il est né le 13 février 1923 en Virginie. Il aurait pu devenir fermier comme ses parents, mais la terre ne l’intéressait pas. Il voyait plus haut. Il regardait les nuages, et même derrière les nuages. Si bien qu’il est devenu pilote en 1943, à vingt ans.

Toute petite rétrospective :

Les premiers avions à réaction opérationnels voient le jour à la fin de la guerre (bien qu’un premier modèle date vraisemblablement de 1908). Mais dès la fin de la guerre, les ingénieurs décident d’aller plus vite que le son. La célérité du son est la vitesse de propagation des ondes sonores. Cette vitesse ne dépend pas de la fréquence de la vibration, et que vous soyez baryton ou soprano, votre voix se déplacera a la même vitesse. Celle-ci ne varie qu’en fonction de la compressibilité et de la masse volumique du milieu de propagation. .

Ainsi, la vitesse du son dans l'air, dans les conditions normales de température et de pression, est d'environ 340 m/s (1224 km/h). Dans l'eau, le son se propage plus de quatre fois plus vite, à environ 1 500 m/s (5400 km/h). Dans le vide, le son ne se propage pas. D’ailleurs, il n ;y a pas de son.

Si l’avion approche de cette vitesse, il devient instable et on constate un durcissement des commandes. Il est alors difficile à contrôler. Geoffrey de Havilland, le fils du célèbre constructeur, y laissa la vie, son engin s’étant désintégré à l’approche des fameux 1224 kmh. Plusieurs autres pilotes d’essai connurent le même destin, accréditant la légende que la vitesse du son était INFRANCHISSABLE. Qu’à l’approche de cette vitesse, l’air devenait aussi solide qu’un mur de briques. D’ou l’expression LE MUR DU SON.

Chuck ne croyait pas au mur du son.

L’armée de l’air américaine n’y croyait pas non plus et voulait dépasser cette vitesse que les gogos de tous poils croyaient infranchissable. Elle avait pour cela ‘’l’arme fatale’’, le X-1 de la Bell Corporation, et le meilleur pilote d’essai civil, Slick Goodlin. Celui-ci estimait que risquer sa vie coûterait à l’US Air Force la somme de 150 000 dollars. Somme énorme à l’époque. Avant de dépenser autant d’argent, les comptables militaires eurent l’idée de demander à Chuck s’il était prêt à risquer sa vie lui aussi, et pour combien. Chuck leur dit que son salaire de capitaine était de 283 dollars par mois et que cela lui suffisait pour vivre.

L’armée de l’air eut ainsi la satisfaction d’économiser 150 000 dollars, et décida que la tentative aurait lieu le 14 octobre 1947 à Muroc Air Force Base (devenue depuis Edwards AFB), en plein désert californien. Et que cette tentative devrait rester secrète, qu’elle soit couronnée de succès ou non.

Le 14 octobre était un mardi. Le dimanche, Chuck et sa femme, la belle Glennis, font une course à cheval au milieu des yuccas du désert, quand le soleil se couche et que seule la lune éclaire encore mais faiblement la flore désertique. Le cheval de Chuck, capricieux, fait un brutal écart, le cavalier tombe et se casse deux cotes. C’est très douloureux, parait-il. Chuck pense alors avec justesse : « si je vais voir le médecin militaire, je serai interdit de vol… et un autre, peut-être, franchira MON mur… ça, jamais ! ».

Chuck va trouver son mécanicien, Ridley, et le met dans la confidence : « avec mes cotes cassées, je ne peux pas fermer la verrière du X-1 ». Ridley comprend le problème, prend un balai, en scie un morceau de trente cm, et explique à Chuck comment fermer la verrière avec sa main gauche, en s’aidant de ce morceau d’équipement supersonique supplémentaire.

Le X-1 est largué d’un B-29, à 8300 mètres d’altitude. Il dispose de deux minutes trente de vol pour établir son record. Chuck s’installe dans le cockpit minuscule, ferme la verrière et demande le largage. Il allume sa ‘’chaudière’’, cabre sa machine, et monte en chandelle.

A 0,87 Mach, Chuck dit à Ridley resté dans le Boeing « ya eu une petite secousse… »

A 0,96 Mach, nouveau message « efficacité du gouvernail de profondeur retrouvée… »

Puis un autre message « dis donc, Ridley, note si tu veux… ya comme un problème avec ce foutu machmètre… »

C’était sa façon de dire que le mur n’existait plus, sans avoir le droit de le dire.

Au même moment au sol, on entendit le deuxième BANG de l’humanité, le premier ayant eu lieu il y a quinze milliards d’années… le sol du désert trembla, exactement comme l’avait prévu le physicien Theodor von Karman bien des années auparavant.

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Bruno Amouroux a publié quatre bouquins en vente sur www.edilivre.com et sur www.amazon.fr

Délivrez-nous du mal, l’histoire d’un tueur en série qui tombe dans le piège délicieux de l’amour ;

Meena, Le dernier roman : une histoire d’amour entre quatre personnages qui savent oublier leur jalousie…

Deux frangines, une passion de famille : trois hommes aiment la même femme. L’un a son âge, l’autre pourrait être son père… mais qui est le dernier ?

Sophie, Julien et moi… une nouvelle histoire d’amour tout à fait correcte, car aux purs, tout est pur.

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Chuck Yeager, la suite

Une anecdote significative

« Un jour, Chuck accompagnait un autre pilote à 6000 mètres d’altitude. Il remarqua que celui-ci faisait des manœuvres qui l’éloignaient de lui. En le contactant par radio, il s’aperçut qu’il souffrait d’hypoxie, probablement parce qu’un raccord du tuyau d’arrivée d’oxygène s’était desserré. Dans ce cas, les pilotes deviennent comme des ivrognes agressifs avant de perdre conscience. Yeager lui dit de vérifier son oxygène et de descendre à plus basse altitude, mais l’autre n’arrêtait pas de l’envoyer se faire faire des choses étranges chez les zoulous… il inventa un autre stratagème : « eh, lui dit-il, j’ai un problème moteur, je dois me poser, descends derrière moi » et il commença à descendre. En levant la tête, il s’aperçut que l’autre restait au-dessus de lui, délirant toujours. Alors, Chuck fit une chose absolument anti-Yeager : il hurla dans le micro : « écoute mon petit africaniste distingué, TU VAS DESCENDRE DERRIERE MOI ! ». Le changement de ton, Yeager hurlant, pénétra le cerveau asphyxié du pilote : Bon Dieu ! Le célèbre Yeager hurle ! Il hurle ! A moi ! A l’aide ! Doux Jésus ! Et il se mit à descendre derrière lui. Yeager savait que s’il pouvait le faire descendre à 3500 mètres, l’oxygène de l’air le ferait revenir à lui. C’est ce qui arriva. Eh ! Qu’est-ce qui s’est passé ? Après l’atterrissage, il se rendit compte qu’il s’en était fallu d’une minute ou deux pour qu’il perdît conscience et s’écrasât dans le sable du désert. Au moment où il sortait du cockpit, un F-86 passa au-dessus de sa tête et exécuta paresseusement un tonneau à vingt mètres du sol, puis disparut au-dessus de Rogers Lake. Signé Yeager »

Une autre…

Au début, à la tour de contrôle, on s’aperçut tout a coup qu’il y avait un grand nombre de pilotes d’essai qui parlaient avec l’accent traînant de la Virginie Occidentale. Il y eut également un nombre incroyable de pilotes de chasse qui parlaient avec l’accent de la Virginie Occidentale. L’espace aérien au-dessus d’Edwards devenait chaque jour plus j’m’en foutiste et plus super relaxe. Puis l’espace je-m’en-foutiste et pèquenaud s’élargit parce que les pilotes de chasse et les pilotes d’essai, ou qu’ils aillent, étaient considérés comme la crème de l’aviation, avec un cachet bien à eux. Et comme l’armée est le terrain d’entraînement de presque tous les pilotes de ligne, cela fit tache d’huile au point que tous les passagers d’un bout à l’autre de l’Amérique commencèrent à entendre la voix je-m’en-foutiste et paresseuse qui leur parvenait du cockpit … « maintenant, m’sieurs dames, heu… ici c’est le commandant … hum… ya une p’tite lumière rouge au tableau de bord qu’essaie de nous dire que… euh… le train d’atterrissage i reste pas en position verrouillée… »…

Peu importait d’ailleurs puisqu’il y avait, là-bas, dans le cockpit, un homme dépourvu de système nerveux, capable de faire face à toutes les situations, oui, toutes… cette voix, cet accent rassurait les passagers… et aujourd’hui encore continue de les rassurer. Car 60 ans après son dernier vol, tous les pilotes survolant les Etats-Unis continuent de prendre l’accent traînant et goguenard de Chuck… et votre chroniqueur, qui les a survolés plus de 100 fois, ne fait pas exception à la règle !

 

 

Le 14 octobre 2012, 65 ans après son exploit, Yeager, alors âgé de 89 ans, franchit à nouveau le mur du son à bord d’un McDonnel Douglas F-15 Eagle, piloté par le capitaine David Vincent... (Ce nom vous rappelle-t-il quelque chose ?)

Chuck, au cours de sa carrière militaire, battit encore bien des records de vitesse et d’altitude. Il fut le premier pilote américain à voler sur un MiG-15 après que son pilote, No Kum Sok, se soit posé en Corée du Sud.

Il fut nommé commandant de l’école de formation des futurs astronautes de la NASA, bien que lui-même ne put en faire partie faute de diplômes…

Un accident au cours d’un vol d’essai mit fin à sa carrière de pilote d’essai en décembre 1963.

En 1966, affecté aux Philippines, Clark AFB à Angeles city, il totalisa 414 heures de vol en 127 missions, au Vietnam et dans le Sud Est Asiatique.

Nommé général de brigade en 1969.

Je voulais mentionner l’ensemble de ses décorations mais la place impartie manquant cruellement, le lecteur pourra les découvrir sur Wikipedia.

Ceux que l’aviation intéresse liront avec intérêt L’ÉTOFFE DES HÉROS, fantastique bouquin de Tom Wolfe ; ils visionneront l’excellent film qui en a été tiré en 1983 par le réalisateur Philip Kaufman avec tenez-vous bien : dans le rôle de Yeager, Sam Shepard ; dans le rôle d’Alan Shepard, Scott Glenn … et dans celui de John Glenn, Ed Harris…

 

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